mardi 3 avril 2012

SUR LE BANC






Assises dans la cour de l’école, devant le bureau de vote, Jane et Alphonse, deux connaissances du quartier, s’interrogent :

Jane : Alors , Alphonse, tu vas y aller ? T’as l’air penaud, mal à l’aise. T’hésiterais donc à faire ton devoir, par hasard ? Aurais tu oublié que nos ancêtres se sont battus pour obtenir le droit de nous occuper de nos affaires, le pouvoir de décider ce qui est bien pour nous ? Allez, Alphonse, un vrai citoyen comme toi, un vrai patriote, ça vote.

Alphonse : Mais, Jane, tu sais bien que j’suis pas contre le vote. Et les voisins, qu’est ce qui diraient si ils me voyaient pas à l’école. Et puis, tu m’dis que le vote c’est un droit et un devoir. Ça veut dire quoi ? Si c’est un droit, je fais ce que je veux. Si c’est un devoir, je suis obligé de faire ce qu’on m’ordonne ; Alors, Jane, comment t’expliques ce truc ? Tu vois, c’est ça, aussi, qui m’chamboule la tête…

Jane : bien sur, t’es libre d’en faire à ta tête, mais, Alphonse, tu t’rends compte, y a un président d’la république à choisir ; Quel honneur, quelle gloire pour nous autres …c’est comme si on nous mettait au rang des notables, de ceux qui dirigent le pays. Tiens, c’est comme si t’avais la légion d’honneur et moi l’mérite agricole.

Alphonse : Moi, tu sais, Jane, les médailles c’est pas mon fort. Si le pouvoir que j’ai grâce à ce droit de vote, c’est seulement de l’abandonner entre les mains de quelqu’un d’autre que moi, ce n’est plus « mon » pouvoir mais une simple permission de répondre à une question que je n’ai pas posée. Tu crois vraiment qu’un président de la république, ça peut nous être utile, à nous qui n’ sommes pas d’ la Haute ?

Jane : Oh, Alphonse, quand même…y nous en faut un d’ président.

Alphons : Ben tu vois, Jane, plus j’y pense, moins j‘en suis sur, qui nous en faut un d’ président. T’as qu’à r’ garder dans quelle mouise y nous a mis, çui la qui vient d’tirer ses cinq ans. Et tu voudrais qu’on r’ mette ça, avec lui ou sa doublure ? Alors, non, Jane, finalement, j’irais pas à cette foire, cette foire du Trône. Tant pis pour les voisins ; On n’est pas des moutons, quand même. Ça s’rait bien qu’tu fasse comme moi, Jane. Qu’ on soient les plus nombreux à se battre pour en sortir de cette mouise, sans baisser culotte devant une urne funéraire mise généreusement à notre disposition par les « élites » qui nous gouvernent..

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